Manarah Nindralyr l'Ahib exilée.
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Manarah Nindralyr l'Ahib exilée.
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- Récit de vie de Manarah Nindralyr:
- ll est rare que j'ai de la compagnie. Je vous en prie, asseyez-vous.------------------------------------------------------------"Mon histoire donc, vous vouliez connaître mon histoire... Quelle drôle d'idée...
J'ai vécu dans un monde plongé dans la noirceur et l'amertume dès lors le jour ou ma mère m'a donné naissance. Je suis toujours là. Mais dans quel état ?------------------------------------------------------------
"Tout a commencé bien avant ma naissance, bien avant celle de mes aïeux et des mes ancêtres. La création du tout. On dit que Sylvia descendit des cieux avec Krogdalo, les fées des dents et les esprits de la forêt pour y créer la vie. La déesse mit tout en oeuvre pour faire de cette Terre, un havre ou ces enfants pourraient vivre en harmonie pendant des millénaires. Ainsi, grâce aux pouvoirs du Soleil et de la Lune elle créa sa progéniture, s'ensuivra des milliers de racines qui surgiront hors de la terre pour faire éclore autant de familles de Ganelles et de Védirs. Avant de disposer du berceau qu'elle avait édifiée, Sylvia acheva son Eden terrestre en établissant au centre de celui-ci une symbolique qui survivra aux temps et à la vie elle même. Kamasylve l'arbre sacré."------------------------------------------------------------"Je m'en rappelle encore..."------------------------------------------------------------
"De ce conte hédoniste. Toutes les figures maternelles s'attelaient chaque soir à narrer cette histoire à leurs portées pour qu'elles succombent aux monde des rêves. Les yeux de ma mère scintillaient à chaque mots dictés à travers cette histoire, peut être était-elle fière de ce que nous sommes. Sûrement.
Mes souvenirs sont enfumés par un brouillard épais et bien trop d'années écoulées, mais je me souviens d'une chose tout à fait perceptible relatant de cette époque :
Au fur et à mesure des nuits à conter inlassablement encore et encore cette histoire, un vide profond s'installait dans les pupilles de ma mère. Un vide tel, que même sa voix venait à imiter la teinte de ses prunelles, laissant seulement échapper des mots sans émotions et nuances de couleurs. L'histoire devenait grise et morose. J'ai compris à ce jour qu'elle n'y croyait plus. De ce monde que notre Déesse nous a laissé. De revoir un jour son bien-aimé parti affronter le mal pour protéger son foyer.------------------------------------------------------------"Je n'ai jamais autant regretté d'avoir raison."------------------------------------------------------------
Des ombres s'étaient propagées dans tout Kamasylve environ un an avant ma naissance, en empruntant les Haut cols des montagnes de Valtarra. Elles avaient ravagés l'Eau, la Terre, et les Elfes, qui bien trop faibles et trop peu entraînés contre une telle menace avaient été dans l'obligation de brûler une partie de Kamasylve pour repousser le mal. Les pertes ont malgré tout, été conséquentes. Mon père a fait parti du lourd tribu. Ma mère ne me l'a jamais dit. J'ai supposé cela des années plus tard, à l'âge ou la compréhension des mots me permettait d'appréhender des archives bien trop complexes pour un esprit Vedir de quelques printemps. Archives auquel je prenais un malin plaisir à y desceller la moindre trace de notre histoire, en étant consciente que si on m'attrapait, la sanction serait sévère. Un enfant n'a pas besoin de connaître la douleur de notre peuple. Les petites filles écoutent les récits et les belles histoires contées par leurs mères. Evidemment. Mais tout comme ma mère, je n'y croyais plus.------------------------------------------------------------
Ainsi pendant plusieurs années, après avoir décrypté un bon nombre de documents dans chaque lieu anodin ou j'avais l'opportunité de me rendre, je m'éduquais toute seule dès que l'attention maternelle se relâchait . J'appréhendais peu à peu ce qu'y entourait mon quotidien. Ce qu'on me disait pas. Le décès de mon père. "Pourquoi" et "comment" devenaient des réponses avant même que j'anticipe celles-ci. Les journées se répétaient ainsi dans une routine de plus en plus incommodante.
Plus je façonnais mon esprit, plus je constatais la faiblesse de notre peuple. Rajouté à cela l'incapacité de ma mère a surmonter un deuil qu'elle n'envisageait pas faute d'un mental trop tourmenté. Un partie de moi même s'était assombrie. Je n'avais que 8 ans. Et le monde sur lequel je me tenais debout malgré un équilibre fébrile, allait radicalement se déchirer sous mes pieds, dans un océan pourpre de sang et de chair.------------------------------------------------------------
Peu de temps après, Ganelles et Védirs, frères et sœurs, dont l'harmonie mutuelle était parvenue pendant tant d'années à faire pâlir Sylvia elle même, a volé en éclat. Faute de divergences d'opinions concernant l'utilisation des nouvelles armes forgées contre les ombres toujours présentes, on s’entretua. J'ai regretté amèrement comprendre ce monde du haut de mes 8 ans. J'ai tant regretté discerner la peur et la tristesse dans les yeux de ma mère, n'envisageant en rien perdre sa fille unique après son mari. J'ai tant regretté apercevoir des morceaux cramoisis et encore fumant sur les bas côtés des chaussées de mon village, ou j'aurais du grandir comme une Vedir, et comme toutes les autres comme moi, normalement. J'ai tant regretté mes lectures pour appréhender ce monde, tant regretté de comprendre que ces monceaux de chairs s'accumulant sur les chemins que j'empruntais jadis pour observer les lucioles, appartenaient aux miens. Le moindre lieu anodin s'était pétri par la souillure de la guerre.
Je fus totalement anéantie, mon esprit convergeait dans de multiples pensées volatiles, qui, de par et là revenaient me hanter en s'accumulant avec les nouvelles fraîchement arrivées. Je passais mes journées, dans la maison familiale, au sous sol, à contempler l'extérieur par le soupirail, J'attendais que tout redevienne comme avant.... ou que tout disparaisse. Notre village, dont les liens des uns envers les autres se faisaient dès le jeune âge, s'organisait pour assurer au mieux la sécurité de chaque foyer. Ma mère, aux antécédents de guerrières datant d'avant ma naissance, restait des nuits entières à protéger le foyer. Mais elle ne parvenait pas à me consoler.
Cette période fut probablement l'une des plus pénibles de ma vie. Je pense que ma mère ne savait pas comment réagir, elle ne voyait pas les multiples plaies ouvertes dans mon cœur et mon esprit, quand probablement les siennes étaient bien plus ébréchées par tout ce qu'elle a du, et doit encore surmonter à ce moment. Son deuil, sa fille, son village, sa propre vie, l'avenir de notre monde.
J'ai eu de la compassion pour elle durant ce cycle de ma vie. J'en pleurais même à chaudes larmes secrètement. J'ai tant pleuré. Moi qui blâmait la faiblesse des miens. A ce moment, j'ai maudis la mienne.------------------------------------------------------------
La tourmente, l'agonie, la détresse, la violence, le désarroi, l'incompréhension. Tout pris fin subitement. Notre arbre bien-aimé furieux de nos agissements contre-nature, enleva tout pouvoir conférés par les armes, à l'accepté d'une petite élite majoritairement composés de Vedirs y bénéficiant et sachant les maîtriser à bon escient. Le conflit pris immédiatement fin, de même que Kamasylve, qui rentra, suite à cela, dans un sommeil profond.
La vie a ainsi reprit péniblement son cours. Mon village situé aux abords de la grande cité avait payé un lourd tribu. Tout le monde n'avait pas eu la chance de sagement attendre la fin du conflit. Les fractures de cette guerre n'avait laissé personne indemne. La civilisation tout comme la nature allait mettre un moment pour retrouver leurs apparats d'autrefois.
J'ai essayé moi même de raccoutrer mon esprit en reprenant graduellement le cours de ma routine "incommodante". J'étais particulièrement proche de ma mère à cette période.
Peut être avais-je besoin d'un surplus de réconfort qu'elle seule pouvait étancher. Ainsi, Mère et fille marchait à l'unisson, dans un parfaite symbiose que seule deux êtres liés par le sang peuvent connaître.
Mais les sourires s'immisçant doucement au delà d'un regard, de douces paroles ou même de liens charnels rappellent dans une anesthésie de sérénité, que le malheur n'est jamais très loin….------------------------------------------------------------
Des années s'écoulèrent, petite fille Vedir d'antan, je me rapprochais de plus en plus des traits fins et élancés de ma mère, qui, au fil du temps, avait retrouvé peu à peu son ardeur et sa force qui forçait l'admiration. Son deuil n'était pas terminé, mais petit à petit, elle s'accommodait a retrouver des activités qui lui faisait oublier, l'espace d'un instant.
La vie n'était pas de tout repos, mais bien plus tolérable que l'asphyxie qu'apporte la guerre. Nous vivions simplement. Mais au fil du temps, les liens unissant les peuples devenaient rigides, comme une toile d'araignée qu'ont aurait trop étirée.
A 30 ans je poursuivais ma quête de savoir, aspirant le moindre écrit dans mon esprit de même que le puceron contamine la plante. De petite fouine fourrant son museau n'importe ou, je devins.. probablement une amélioration de cette espèce nuisible. Sylvia n'avait peut être pas appréhendé l'évolution des nôtres de cette manière…
Je finis même par être honorée par le titre élogieux de "Chiendent littéraire". Ma taille ne me permettait plus de me dérober dans des lieux improbables. A la moindre approche d'un archiviste, le fardeau de mon corps de jeune adulte trahissait ma fuite, faisant grincer le bois et les gonds de fers le soutenant en guise de plancher.
Les sermons qu'ont adressent à une petite fille, s'étaient transformés au fil des années, par des injures, et parfois même des coups. Notamment les Ganelles, qui montraient une grande animosité à mon égard et à l'ensemble des Vedirs s'étant "radicalisées" ou différenciées de leurs semblables guerrières désignées par le grand Arbre pendant la guerre.
C'est alors en tant qu'hérétique au yeux de certains, que je poursuivis mon insaisissable quête à la recherche d'encre, de pages et d'odeur défraîchie les accompagnant."------------------------------------------------------------"Hérétique. Oui, cela remonte à si longtemps maintenant... La science alchimique n'a pas été la première cause de cette appellation à mon égard, vous savez..------------------------------------------------------------
"Pour ma part, je n'aspirais aucunement à devenir une combattante. Je n'en avais pas l'étoffe ni même le courage. "C'est de la connaissance seule de la vérité que pourra naître un état social meilleur". Je pressentais l'instabilité de nos structures régissant Kamasylvia, ma meilleure option était d'appréhender au mieux quand les fondations allaient, une nouvelle fois s’effondrer. Les stigmates étaient déjà tout à fait visibles et je n'étais pas la seule à les avoir remarqués, loin de là...
Les divergences d'opinions, combinées à des contradictions politiques et morales pour gouverner notre peuple finit par séparer notre société en quatre groupes.
La garde d'Acher, prônant l'ordre et régissant la cité Mère par des lois rigides, grand conservateur des traditions dictées par notre Mère Sylvia comprenant majoritairement des Ganelles.
La majorité des Vedirs embrassèrent le pouvoir des lames élémentaires conférées par l'Arbre millénaire pour se soulever contre les ombres toujours actives.
La garde de Lémoria, prompte à l'harmonie et la communion avec la nature comprenant uniquement des Ganelles. Elles avaient pour rôle de protéger les frontières…"------------------------------------------------------------"La garde de Lémoria...
Et enfin.. attendez un instant.. Juste un instant....
Oui.. revenons à mon histoire. Vous vouliez la connaître.. Quelle drôle d'idée.."------------------------------------------------------------
"Moi, ma mère et bon nombre de Vedirs n'embrassant aucun des trois parties furent catégorisées d'Ahibs, "les elfes noirs", bien que cette appellation nous concernant s'officialisa bien plus tard.
Il est vrai que beaucoup des nôtres aspiraient à un grand pouvoir et se confortaient dans des idées extrémistes, ajouté à cela une rancœur datant de la guerre jadis qui avait fais couler tant de sang... Beaucoup dénonçaient des injustices.
Mais d'autres, comme moi n'avait simplement pas éprouvé l'envie d'appartenir aux trois autres parties, n'y descellant rien d'attrayant. Nous étions ainsi laissées pour compte, délaissées. Et isolées entre nous.
A cette époque, il m'était impossible de me rendre dans la grande Cité pour mes recherches. J'avais soif. Soif de connaissances. Il se peut qu'à cette période, une haine jadis endormie, ai refait surface. Je maudissais cette disparité et différenciation auquel s'adonnaient les différents partis sur les "révolutionnaires" qu'ont aspiraient. Ma mère s'inquiétait beaucoup pour ma sécurité, moi, je fulminais. Comment un être si doux qu'elle, pouvait être catégorisée d'extrémiste ? Ces dégénérés ne regardaient que l'ensemble de la marmite, sans apercevoir qu'à ses bords, il y avait des disparités, et, de part cette simple observation, elle ne faisait pas qu'un. Cela eu un effet néfaste, même pour les plus pacifistes. Comment accepter cette condition de vie qu'ont nous imposent par des dictas sans cohérences. Nous n'en pouvions plus. Des échos sur l'exode des Ahibs vers le Nord, aux abords du mont Kabua, aux frontières de la forêt distordue finirent par faire échos dans notre village. Nous prîmes la décision de suivre le mouvement. Bien d'autres nous imitèrent. Ce fut un déchirement pour ma mère, qui affectionnait par dessus tout sa masure ou elle avait tant de souvenirs.. Mais ce sont des souvenirs. Ils ne flétriront pas avec le temps... La vie elle, s'évapore bien plus facilement.------------------------------------------------------------
Deux années passèrent. La situation ne s'était pas apaisée. Loin de cela. Les extrémistes l'étaient d'autant plus, et ceux qui n'en faisaient pas encore partie s’accoutumaient à le devenir. Des conflits mineurs éclataient tout les jours, avec, comme cible parfaite, nous. Notre position géographique nous permettaient d'anticiper les manœuvres offensives à notre encontre. Malgré tout, la garde d'Acher mit en place un large périmètre autour de notre territoire. Cela n'a fait que raviver le feu que nous tentions d'éteindre de part notre isolement volontaire. Je me souviendrais toujours de cette journée ou Alsmir Fedrond, la figure autoritaire du hameau ou moi et ma mère avions vécu, partit avec un groupes armées dans la tentative de s'opposer au périmètre imposé. La folie s'était emparée d'eux, ne prenant pas conscience que cette action les mèneront au trépas. Des sentinelles la retrouva le lendemain, elle et ses complices, sans vies, les centaines de flèches dans la zone témoignant d'un combat à sens unique. Ce genre d'actions se multiplièrent et les résultats furent identiques. Nous primes conscience de notre faiblesse. La folie au sain des nôtres s'amplifia en parallèle de cette dure réalité. Moi-même j'écumais de rage. Mais je n'étais qu'une simple spectatrice, impuissante, et faible.
Comment raisonner des centaines de consciences lorsqu'un esprit déjà si affligé peine à se maintenir à la surface de la raison ?------------------------------------------------------------
Les tensions atteignaient leurs paroxysmes, et tous les soirs, au crépuscule mon regard se figeait vers ceux avec qui j'avais tisser des liens, comme si à l'aurore, j'étais certaine de ne plus revoir leurs visages. Ma mère tenait difficilement face aux multiples tourments qui l'affligeait. Elle doutait. De ces choix. D'être ici. Mais il était bien trop tard maintenant. Dépasser les frontières préétablies par nos ennemis signifiait la mort. Et en croisant son regard, je savais qu'elle était déterminé à rester malgré tout ici. Plus rien ne nous attendait dehors. Cette idée se dissémina et, telle la peste qui se propage accentua l'insanité de tous.
Quand de tels événements deviennent notre quotidien, les plus faibles sont les premiers à être dévorés, la nature ne fait aucun cadeau, nos propres sœurs sont encore pire... Durant cette période ma mère déploya tout ses talents pour m’entraîner au combat. Mais à contrario de ma mémoire, plus je m'éduquais à l'art de la guerre, moins les résultats se faisaient sentir.------------------------------------------------------------
Le jour ou les choix politiques virèrent au drame arriva. En 272, la régisseuse de Grana, Amélia Ornette, abhorrant déjà les Ahibs, les tenant responsables de l'empoisonnement de sa défunte mère, Oriana Ornette, apprit le décès de sa sœur cadette une certaine Catherine. La grande meneuse de nos troupes, Viorencia Odore était accusée d'en être la meurtrière, fait qu'elle ne réfutait pas.
Immédiatement, la guerre fut déclarée.
Nous n'étions pas dupes. Quelquechose n'était pas dit. Viorencia ne pouvait pas agir de la sorte sans raison apparente. Elle était connue pour être d'une grande intelligence. Trop de sang avait déjà coulé dans des batailles officieuses et sans résultats. Une fausse paix est la source d'une nouvelle guerre, tout comme la paix simulée nuit plus que la guerre ouverte. Et pour une fois, une prise de conscience se réalisa hors de nos rang.
Nos sœurs Védirs détentrices des armes ayant amenées à la 1ère Guerre soupçonnaient elles aussi que la Terre allait à nouveau s'abreuver d'un fluide pourpre et limpide. Elles décidèrent de toutes s'éclipser du jour au lendemain, leurs positions étant bien trop délicates pour décider de leurs destins."------------------------------------------------------------"DES GUERRIÈRES ?! DES GUERRIÈRES ?! Existe-t'il seulement une seule voie parmi les sentiers d'une guerrière qui amène à l’abdication avant même la bataille ? Non, ô foi de Narc, non. Des lâches, au mieux.
Excusez moi..Reprenons....
Vous êtes bien calme… Le silence vaut une réponse après tout."------------------------------------------------------------
Quelle aubaine se fut pour la garde d'Acher, débarrassée d'une potentielle épine dans la chausse. Il ne restait qu'un ennemi. Nous. Et nous n'avions plus aucun soutien.C'était le crépuscule. L’échiquier était place. Les pions en mouvement. Les pièces blanches s'avançaient pour dévorer leurs opposées dans une nuit qui décida du destin de tous.
Viorencia Odore soutenait nos troupes. C'était une des rares fois ou je l'aperçu. Sa longue chevelure argentée virevoltait au gré d'une douce brise, et faisait office pour tous, d'un étendard de bataille.
Ses yeux ne laissaient transparaître aucune peur, mais une haine insondable qui allait se déchaîner sur nos assaillants. Elle ne fit aucun discours. A quoi bon. Tous ceux présents à ce moment rivalisaient d'une hargne similaire à la sienne. Ceux qui avaient pris conscience de la tournure des événements s'enfuirent avant cette nuit pour rallier la cause des Ganelles. C'était l'unique chance de dépasser les frontières. D'un certain point de vue, cela pouvait se comprendre.
Viorencia s'était concertée avec ses meilleures unités des jours auparavant pour une mission bien particulière. J'appris bien plus tard qu'elle aboutissait au vol d'une branche de Kamasylve. La princesse Brolina fut également capturée pour une raison que tous ignora.
Notre bataille allait leurs faire gagner le temps dont elles avaient tant besoin. La grande cité s'était vidée de sa garde. Il n'y avait pas de meilleure occasion pour Viorencia de prendre sa revanche sur Amélia Orlette.
L'atmosphère était pesante. Le calme, insoutenable. Comment a t'on pu en arriver là ? Je n'avais plus la notion du temps et chaque minutes qui passa, était aussi longue qu'une vie entière. Telle une enfant gâtée, j'empoigna l'une des griffes de ma mère pour y trouver la chaleur qui s'était échappée de mon corps tout en fermant les yeux en conservant ma position au sein de l'armée. L'arrière.
Un ouragan s'approchait. Face à elle une bourrasque. L'issue était encore une fois, évidente. Je me rappelle de cette nuit. Malgré moi, comment pourrais-je l'oublier ?
J'étais pour la première fois officiellement armée et équipée. D'une lame courte. J'espérais de tout cœur ne pas en avoir l'usage. Non pas que je ne voulais pas tuer. Mais je savais pertinemment que le premier combat qui allait me faire dégainer allait sonner mon trépas. Je ne voulais pas mourir. Qui le veut ?
Ma mère, joua son rôle d'antan se tenant à mes côtés, droite, en tant que guerrière, sa fine lame recourbée portant son nom contre son dos. Elle était prête. Je le vis dans ses yeux. Soit la folie l'avait totalement consumée, soit elle voulait réellement en découdre.Musique liée à la bataille.
Les premiers crissements d'armures de l'armée adverse résonnèrent. La nuit nous jouait de mauvais tour. Une ombre dont les limites semblaient impossible à discerner se mouvait, droit sur nous, en contrebas.
Elles arrivaient, et, tel un ouragan, vinrent déchirer le calme sous une pluie de flèches qui annihila les malheureuses placées devant. Tout alla tellement vite. Chaque cris d'agonies faisaient échos au pieds du mont Kabua. Parmi les dernières lignes avec ma mère, nous écoutions cet orchestre macabre. Après plus d'une heure d’acharnement, le combat faisait rage. Et, lorsque les premières d'entres nous firent marche arrière, à vive allure, Viorencia Odore, d'une voix autoritaire confirma mon idée. Elle sonna la retraite. Je l'aperçu brièvement à ce moment, tentant de réunir nos troupes, le visage embourbé de la mélasse pourpre de nos opposants, son armure s'accaparant de la même teinte. On aurait dit une engeance d'Hadum. Mais elle parvenait tant bien que mal à contenir la panique au sein de nos rangs, facilitant grandement le repli.
Parmi les dernières, moi et ma mère devinrent les premières à suivre le mouvement de recul de nos troupes, la queue de l'armée devenant la tête. Les forces ennemies nous repoussaient vers le Sud-Est. Et s'attelaient parfaitement à leurs rôles de rouleau compresseur... A peine eu-je le temps d'établir une hypothèse, celle-ci se réalisa sous mes yeux. L'ennemi nous menait en bateau. La direction de notre armée quant à notre retraite n'était pas décidée par nos troupes mais les leurs.. De nombreux groupuscules de la garde d'Acher en alliance avec les soldats de Lemoria s'étaient détachées au préalable avant la bataille hors de l'armée principale, de manière à nous laisser qu'une voie d'échappatoire possible. On nous guidait comme du vulgaire bétail.. Ainsi le Sud-est était notre destination. De toute façon avions-nous le choix ?"------------------------------------------------------------"Moi et ma mère furent parmi les premières... Je l'ai déjà dit ?"------------------------------------------------------------
"Après plusieurs minutes de course effrénée, notre armée croisa le fer maintes fois avec ces groupuscules, probablement nous étions-nous trop diluées sur des chemins non conformes aux plans de l'ennemi. Des flèches furent encochées dans la pénombre quasi totale d'une nuit ralliant plus que jamais les ténèbres à elle. Des bruits sourds se faisaient entendre au sein de notre armée pour chaque sifflement de cette pluie d'aiguilles. Chaque son correspondait à la chute d'un corps venant abattre contre le sol, sans vie. Mes poumons étaient dans un état des plus lamentables, et la cadence de mon rythme cardiaque me faussait la vue mais je continuais à courir, au côté de ma mère dans une posture tout aussi insoutenable.
Un segment de la garde de Lémoria, armé d'épées courtes se rua sur les premières lignes de notre armée à la sortie de la clairière de la forêt distordue. Une Ganelle surprit ma mère dans sa course folle... lui tranchant d'un geste chirurgical la gorge. Le choc de sa dépouille s'affaissant contre la bruyère me fit frémir, pendant que je toisais le fin filet de sang se détachant de son cou, qui, à la sortie de l'épaisse sylve, reflétait la Lune...
Une colère insoupçonnable monta en moi. Les larmes entremêlées d'un cri de banshee vinrent se mêler à cette haine. Je pris Dreana, l'épée de ma défunte mère projetée à mes pieds à sa chute. Après un combat acharné ma hargne trouva la faille. Je planta sans aucune finesse le fer entre les deux yeux de la guerrière qui chuta lourdement sur le sol. J'ai replongé maintes fois l'épée dans son visage complètement déformé par mes coups, des lambeaux de chair venant, de temps à autre caresser mes larmes. Je me releva péniblement quand la tête fut dissociée du corps, la gouttière de ma lame, délaissant un ruisseau pourpre sur mes bottes de cuir.
Je venais de dérober une vie de mes mains pour la première fois. Déposant un baiser sur le front du corps inanimé de ma mère en fermant ses yeux délicatement, le souffle coupé, je patienta un long moment. Mais je ne pouvais pas rester.
Posant un dernier regard sur le cadavre, j'essuya d'un revers de manche mon visage souillé, en remettant en place des mèches rebelles imbibées de sang et, tel un métronome, je me remis à courir au même rythme que mes voisins, une fois l'assaut des embusquées anéantis.
Je garda en main Dreana, la scellant d'une poigne ferme et décidée pendant de longues heures, l'esprit vide, les yeux dans le néant. Notre armée subit de lourdes pertes, mais grâce au génie militaire de Viorencia Odore, les Ahibs n'avaient pas été annihilées. Et notre haine n'avait que gagné en intensité. Il était encore trop tôt pour se réjouir. La garde d'Acher continuait à nous repousser. Et elles seront bientôt là...
D'une couleur rougeâtre, les premiers rayons du soleil percèrent les contrées Kamasylviennes. L'aube se leva. Et l'ombre de la mort me consola dans ma volonté de vivre. Mais nous ne pouvions pas rester. Elles arrivaient…------------------------------------------------------------
Le jeu du chasseur et du chassé dura ainsi plus de deux jours. Maintes fois j'ai voulu abandonner, m'arrêter dans mon élan et attendre que la vague scélérate s’abatte sur moi, mais cette ébauche de plan s'évaporait à chaque revers de regard porté sur la lame de ma mère. D'autres n'avaient pas cette fatalité les cramponnant à la vie , et à controverse, reproduisaient ce que je me refusais. Par fatigue. Par manque de volonté. Ou de conviction. Peut être les trois. Elles se dissociaient du peloton, attendant leurs sorts. Quoiqu'il en soit, tout le monde savait qu'on ne les reverra jamais.
Nous arrivâmes aux extrêmes frontières Kamasylviennes à la fin du 2ème jours. Prendre le temps de réfléchir s'avérait contre-productif. Même le plus sot d'entre nous avait compris le stratagème ennemi : Nous exiler hors de notre patrie Mère, de force. Lorsque les premiers détachements de nos troupes foulèrent ce qui s'apparentait à une terre complètement desséchée, et que plus tard, les retardataires l'empiétèrent à leurs tours, l'ensemble de notre armée s’amassa. Viorencia, jouant le rôle d'un phare, avait levé sa dextre le plus haut possible, et, d'une autorité de despote, stoppée l'intégralité de nos troupes. Elle savait. Que cette folle course prenait fin maintenant.
Et elle avait raison. Nous étions proches du Pays des épines. Quelles siphonnées iraient s'aventurer dans ce purgatoire naturel ? J'avais lu à ce sujet. Et les illustrations que j'avais visionné jadis, dans des archives, relatant de monstres hirsutes d'une taille et d'une voracité sans limite se trouvant dans cette zone, fit tressaillir l'intégralité de mon corps épuisé.
L'ennemi avait gagné. Soit nous restions sur ces Terres asséchées que Narc semblait avoir maudit en finissant par mourir de faim, soit notre destin se jouait aux Pays des épines. Mais notre sort risquait d'être bien plus atroce et expéditif là-bas. Quoiqu'il en soit, nous étions tous accablées par la fatigue et cette défaite écrasante. On ordonna l'établissement de l'armée le soir même. Des camps rudimentaires furent montés.
La nuit tomba, et dans un calme pesant, je repensa à ma mère en toisant les étoiles. Une remontée d'afflictions émotionnelles me submergea. Narc n'avait pas besoin d'apporter la pluie sur ces terres. Je venais de les noyer de mes larmes..------------------------------------------------------------
La suite de mon récit va être expéditif. Les semaines passèrent et la majorité d'entre nous recherchait le pouvoir pour regagner ce qui nous étaient dut. Kamasylve. Et elles le trouvèrent dans la cause même de la 1er guerre. Elles puisèrent dans les forces occultes. Le mot "folie" a alors pris tous son sens. Celles qui s'y adonnaient se mutilaient, voir même s'entretuaient. Les visages de certaines se boursouflaient, pendant que d'autres raclaient leurs mâchoires à même la roche. Même la mort semblait plus douce. Beaucoup d'entre nous se sont détachées doucement de ce cortège macabre durant cette période, ne souhaitant aucunement prendre part à cette aliénation pour tenter de canaliser un pouvoir instable. Je n'ai pas eu besoin de réfléchir bien longtemps pour faire partir de ces groupuscules encore lucides. J'aurais probablement du l'être bien plus tôt...
Mais, secrètement, ce pouvoir…------------------------------------------------------------"Il m'envoûtait."------------------------------------------------------------
Malgré tout, les esprits les plus forgés parvenaient à contrôler cette force et s'accoutumaient avec. Evidemment, Viorencia fut parmi ces "heureuses" élues. Mais çà ne suffisait pas. La reine des ronces voulait encore plus. Quand la recherche du pouvoir devint plus intense et que la faim rongea les rangs, elle ordonna de se rendre au Pays des épines.
La goutte d'eau de trop. Je mis plusieurs nuit a préparer mon exil. Provisions, carte et même un peu de ressources pécuniaires. J'étais décidée. Ou j'allais ? Le plus loin possible, tant que cela me maintenait en vie. Je préfère repasser les frontières Kamasylviennes et mourir dignement qu'être assujettie par des forces qui nous dépassent. Est-ce que cela fait de moi une traître au même titre que nos sœurs guerrières ? Je ne voulais pas y penser, encore moins l'accepter. J'étais résolue, cela n'y changerai rien.
Ainsi, avec des complices partageant la même "clairvoyance" nous nous sectionnèrent du corps principal une nuit ou cela était possible. Je ne me retourna pas. Je ne voulais pas hésiter maintenant. C'était hors de question.------------------------------------------------------------"Ces sombres forces murmuraient mon nom.
Cette voix.. Encore... encore... Elle résonne dans ma tête comme les clapotis des gouttes d'eau dans une caverne."
...
"L'entendez-vous... ?"------------------------------------------------------------
Après une bonne heure de course effrénée on aperçu en contrebas les riches forêts propre à Kamasylve. Nous allions nous séparer maintenant. Se faufiler en territoire désormais hostile en groupe nous laissera aucun échappatoire.
"Là ou d'autres vont échouer, moi je vais réussir". Cette pensée égoïste avait traversé l'esprit de chacune d'entre nous.
D'un regard incisif, la plus âgée murmura un discours, la dextre sur la poitrine.
"La liberté, c’est la faculté de choisir ses contraintes. Le caprice d'aujourd'hui nous délivrent de bien d'entres elles, mais en ramènera bien d'autres. Alors soyez digne de ce caprice mes sœurs, assumez-le et n'oubliez pas notre histoire. Contez-là, criez-là de tout votre saoul et par dessus tout, soyez fières d'être Ahib. Nos combats passés n'ont pas été vains. La lucidité a remplacé la folie. La lucidité est la nouvelle forme de rébellion. Une haine immobile, un miroir brisé.
Prouvez-moi que les morceaux peuvent être recollés en combattant d'une manière qui vous est propre."
Sur ces dernières paroles, nous empruntâmes chacune de notre côté, une artère en contrebas qui désormais, allait décider de notre destin. Mais cette fois-ci, aucune force armée n'était là pour nous l'imposer…------------------------------------------------------------
Des jours passèrent. J'étais miraculeusement en vie. Et bientôt en dehors des frontières Kamasylviennes. Il ne me restait qu'un obstacle, de taille. Ainsi, dans un ultime effort, je crapahuta dans l'objectif de faire l'ascension du Mont Valtarra, là ou tout avait commencé. En contrebas, un nouveau monde s'offrait à moi. Agrippant la poigne de Dreana l'espace d'un instant, je finis par entamer la descente de la montagne millénaire.
"Les faibles meurent en premier". Je représentais donc la contradiction même.
Mais désormais, je devais continuer à vivre. Et je discernais parfaitement dans quel domaine j'allais briller. Force de constater que mes lectures n'ont pas été inutiles, je me concentra en premier lieu sur l'herboristerie. Et les demandes dans ce nouveau monde affligé par les guerres étaient nombreuses. Mon talent dans ce domaine, fut fortement sollicité. Je restais à l'écart de tout client suspicieux. J'étais encore bien trop proche des frontières.
Mais j'aspirais à plus. Au plus profond de moi, je voulais comprendre. Comprendre la cause de la déchéance de mon pays. J'étais obnubilée par ces forces occultes ravageuses. Et les appréhender serait ma manière de recoller les morceaux du miroir...
De fil en aiguilles, cela m'emmena dans la science alchimique, qui, financièrement, s’avéra diablement fructueuse. Je m'écarta rapidement des zones non réglementées pour cette activité, je savais que chez les hommes, la religion est le pire fléau de la science.
Les échecs dans cette nouvelle activité parsemaient mon quotidien. Et c'est toujours d'actualité. J'ai fini par m'installer. Je voulais un jardin pour être dépendante de mes propres ressources et retrouver ma quiétude volatilisée. J'y établi également un lieu de recueil en l'hommage de mes parents.
Ma routine incommodante revenu plus vite qu'un bourrasque hiémale qu'on attends pas. Et dans l'obscurité de mon foyer, je continue à m'éduquer.
"La liberté, c’est la faculté de choisir ses contraintes. Le caprice d'aujourd'hui nous délivrent de bien d'entre elles, mais en ramènera bien d'autres."
La solitude a été la première des contraintes que j'ai expérimenté une fois établie avec le confort adéquat. Ma mère me manque terriblement. Que sont devenues celles ayant suivi Viorencia ? Cette nuit-là, mes sœurs ont t'elles eu autant de chance que moi ? Je n'ai que les rats avec qui discuter et ils grouillent dans mon laboratoire. Mais on dit que la psychologie fonctionne mieux avec eux qu'avec les gens. Cela fait de ces rongeurs une compagnie acceptable.""De toute façon la solitude est toujours accompagnée de la folie n'est-ce-pas ?
Cela m'amène à me poser une question fondamentale.Est-ce la raison qui me pousse à parler toute seule ..... ?"
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Dernière édition par Manarah Nindralyr le Dim 6 Mar - 17:57, édité 18 fois
Re: Manarah Nindralyr l'Ahib exilée.
L'histoire que je vais vous narrer a eu lieu à Behr, village rustique peuplé principalement de braconniers, trappeurs, pisteurs en tout genre jouissant, pour la majorité, d'une émancipation des contraintes liées à une vie citadine. Taxidermies, reventes et braderies de viandes et de peaux sont le quotidien de leurs activités. Nous suivons ainsi Jbib et ses deux amis Rak et Drog tout trois, chasseurs taxidermistes confirmés. Trio névrosés par l'alcool, trapus par la force du temps et bien charpentés. Ils se retrouvaient tous les jours avant le crépuscule dans l’unique taverne locale, pour baragouiner sur leurs routines dans des effluves de bières et d'éructations.
Un quotidien des plus pittoresques direz-vous, mais la vie, aussi simple soit t'elle peut se révéler des plus accommodantes également.
<renchérie Manarah avant de poursuivre dans une quiétude et sérénité se révélant d'autant plus authentique par la douceur de sa voix naturelle>
<renchérie Manarah avant de poursuivre dans une quiétude et sérénité se révélant d'autant plus authentique par la douceur de sa voix naturelle>
Un jour une rumeur unit les trois pochards, qui pour une fois, se mirent d'accord pour autre chose qu'un avis porté sur de la bonne viande, qu'elle soit issue d'un animal ou d'une femme. Le potin avait criblé le village entier de maintes murmures et discussions portées à son sujet. On racontait qu'une chouette, serait apparue aux frontières de la Forêt d'Hexe. Mais loin de là l'idée du simple rapace crépusculaire, oh non. On racontait que son plumage serait sans égal, possédant des proportions indescriptibles par de simples mots. Un tel événement serait plus rare qu'un chêne séculaire dans le désert Valencien.
<La créature elfique se tourne vers l'assistance.>
Pour nos trois jobards taxidermistes, l'idée d'empailler une telle bête pour des fins pécuniaires était... séduisante. L'ébauche de la revendre à des riches collectionneurs d'autant plus. Cependant, récemment, un chasseur avait disparu, ou du moins n'avait pas pris soin de prévenir Behr de son absence prolongée. Enfin bon, si ils sont tous comme notre trio je suppose qu'il faut pas grande chose pour ne pas être à l'heure chez soi. Ainsi personne estimait que cela vaille la peine d'être interprétée par autre chose que :
<L'elfe s'essaya à bourdonner un air sur cette dernière réplique, mais la pudeur reprit le dessus au même rythme que sa voix déraillante.>
" Ils reviendront faut pas s'faire de mouron, picolons, en nettoyant notre tromblon. "
Jbib, Rak et Drog décidèrent de participer à un jeu très populaire à Behr afin de déterminer qui ira en forêt en premier. Identiquement à la rusticité de leurs vies, le jeu l'était tout autant. Deux dés étaient nécessaires. Le premier qui fait un doublon, par en forêt avant les autres. Ensuite, pour les perdants, cela se calcule à l'addition des deux cubes dans l'ordre croissant. De cette manière, deux jours plus tard un autre chasseur part après le premier, et ainsi de suite.
C'est alors que Jbib dans un cri rauque et gras, remporta cette bataille face aux deux bourrus se contentant de respecter les règles malgré tout. Les derniers préparatifs faits, l'heureux gagnant alla s'affaler dans son lit crasseux, deux orteils lorgnant à l’air par delà les trous permettant leurs sorties, fautes de chaussettes en haillons.
Le lendemain à l'aurore, notre homme se déroba hors de la ville encore endormie, accoutré du nécessaire pour être certain de ne pas revenir les mains vides. Son objectif était bien plus clair que ses pensées routinières. Trouver l'animal pour faire pâlir tous les gueux de jalousie, ses amis en premiers, évidemment. Quelle délicieuse pensée. La journée, Jbib avait déjà franchit moultes clairières, prairies, bois et forêts denses. L'homme suait comme un tonnelet de bière percé, la transpiration venant dégouliner sur chaque artère et plis de peau pour retomber plus bas sur sa chemise venant faire barrage. Le temps passa au même rythme que l'astre solaire descendait dans le ciel.
Les personnes désespérées font des choses désespérées. Jbib furieux resserra le poing après avoir ramasser une caillasse, et dans un mouvement de catapulte, l'a jeta de toute ses forces en direction d'une épaisse forêt lui faisant face.
<L'elfe prit un ton grave et maladroit : >
"Saloperie de mouscaille de volaille, encore une rumeur de puants mal léchés !!! "
Et par un miracle insoupçonnable, un hululement distinctif se fit entendre en direction du sombre bois lui faisant face. Jbib leva la tête, sonné par une telle chance. Il avait de quoi. Ce qu'il cherchait tant planait au-dessus de la lisière. Une chouette, dont les courbes correspondaient parfaitement aux rumeurs lui faisait obstacle.
D'une taille impressionnante, son plumage ébène révélait chez elle un aspect presque occulte. L'homme sortit son matériel, mais l'oiseau, aussitôt apparu s'éclipsa dans les profondeurs de l'épaisse jungle, en hululant sans s'arrêter.
" Oh toi... tu m'échapperas pas, saleté !!! " pesta le chasseur en s'enfonçant à son tour dans cette sombre mélasse végétale, suivant le cri distinctif de l'animal. Le feuillage était particulièrement épais, et chaque branches s’entremêlaient les unes sur les autres dans une prison asphyxiante.
La vision acculée rajoutée aux prémices du crépuscule s'approchant, n'aidaient clairement pas Jbib. En plus d’une humidité étouffante, de la bourbe épaisse, et tout ce qui s'apparente à des insectes voulant votre mort, et vous comprenez très vite que l'endroit n'est pas fait pour vous. Mais à défaut d'être doté d'une intelligence innée l'homme était plus que tout autre, persévérant, ou entêté, mais gardons la première qualification à son égard. Il fallait bien lui reconnaître une qualité.
Ainsi dans une course haletante liant l'homme à l'animal, le prédateur à la proie, les deux protagonistes s'enfoncèrent toujours plus loin dans cette purée de bruyères et de branchages. Un véritable labyrinthe. L'oiseau avait un comportement étrange. Il hululait sans discontinuer. Pour un rapace nocturne, être si bruyant était atypique. La nuit se déposa plus vite qu'un brouillard hiémal qu'on attends pas. Et soudain, la chouette s'arrêta de geindre. Jbib stoppa son incursion. Il remarqua pour la première fois un élément troublant. Malgré son cœur battant, le silence était roi. Pas un bruissement, une brise, rien. La forêt s'était parée d'un mutisme sans pareil.
Jbib poursuivi son chemin, les yeux plissés pour discerner au mieux une route qui lui sembla le moins pénible. Impossible d'embraser une branche en guise de torche pour y discerner mieux les alentours. L'humidité faisait obstacle. L'homme échauffé et nerveux à la fois finissait par prendre conscience de la situation qui ne paraissait pas tellement encline à s'arranger. La forêt inspirait l'angoisse en provoquant des nausées chez le chasseur. Chaque échos de ses chausses de cuirs se déposant sur le limon causaient un "Sprotch" distinctif venant perturber cette accalmie soudaine. Une nuit longue et bleue comme une lame de Tolède s'apprêtait à voiler de son châle le monde.
Le temps passa, à contrario des ténèbres qui, elles, déposaient son sombre linceul pour y recouvrir la totalité du bois. Usé et rompu, l'homme poursuivi sa route. Impossible de capturer quoique ce soit dans cette mélasse. Il lui fallait chercher un lieu pour s'établir, afin de reprendre sa mission dès l'aube.
Et, second miracle, Jbib tomba nez à nez devant une masure. La mousse dévorait le bois déjà vermoulu. Des champignons visibles par quelques fragments de lumières lunaires, empoisonnaient également la bâtisse. Le chasseur poussa la porte fracturée sans difficulté, dans un grincement d'outre-tombe faisant écho dans toute la forêt. Scellant l'endroit dans un bruit aussi tonitruant que le précédent, son instinct le dirigea dans la pénombre la plus totale contre une paillasse miteuse et bouffée par les mites.
Plusieurs minutes s'écoulèrent et Jbib s’accommodait de plus en plus avec les ténèbres pourtant absolue, en lorgnant la pièce, le regard moribond. Une chose l'interpella : Ses yeux entrevoyaient des structures s'apparentant à des cadres, peut être des tableaux adhérents aux murs. En leurs centres, Jbib semblaient fustiger de ses prunelles d'ursidé des visages lorgnant sur lui. Le pauvre bourru n'y prêta pas plus d'attention, le silence du lieu entrelacé à son corps tout patraque l’assommant dans un sommeil profond….
Les prémices de l'aurore commencèrent à chatoyer les ombres difformes de la forêt en déchirant celles-ci de ses rayons éclatants. La masure ne fut pas épargnée par la bénédiction apportée par l'astre solaire. Et dans une épaisse couche de poussière entremêlée à de la sciure de bois, la lumière vint dégeler l’homme bourru nécrosé dans son sommeil. La vue encore embrumée par un réveil un tantinet brutal ce dernier distingua quelquechose. La bâtisse ne possédait aucun tableau, ni même de cadre, seulement des fenêtres... Il était persuadé d'avoir vu des formes spectrales s'assimilant à des visages.. Ressentant un mal être, le chasseur releva doucement la tête, lui paraissant anormalement légère…
<Manarah s'arrêta brusquement puis réouvrit la commissure de ses lèvres dans un murmure.>
Le temps est un concept complexe, Ceux qui l'emploie mal sont les premiers à se plaindre de sa brièveté. Mais Jbib, à cet instant, utilisa toute ses ressources physiques et psychologiques pour prendre conscience de la situation bien qu’il était déjà bien trop tard...
Face à l'homme se trouvait trois silhouettes distinctes nimbées dans l'ombre par leurs positions à l'angle du bâtiment, mais également par l'étiquette de leurs accoutrements. Tordues et recroquevillées sur elles-mêmes telles de vieilles écorces asséchées, elles gouaillaient dans un dialecte d'harpie des plus désagréable à l'oreille. A l'épicentre de leurs intérêts se trouvaient un corps, semblant être scellé dans une inertie la plus totale. En rehaussant le regard vers le faciès, Jbib fut pris de nausée. La tête du macchabée était scalpée, sous tous ses angles. Et c'était la sienne. Tout comme ses guenilles, ses chaussettes trouées et le corps qui les trimbalaient. Tout coordonnait dans l'illogique la plus absolue de la scène.
Une des silhouettes se retourna à cet instant propice à la folie. Hideuse et à l'aspect rébarbatif, son visage est imprégné par les rides et les verrues parcheminant les contours disgracieux de ce dernier. Elle lorgna sur l’homme, en ouvrant le dialogue en sa direction :
<L'elfe viendra appuyer sur sa glotte pour faciliter la voix rêche et braillarde qui suivra>
" Lees fillesss r'gardez un peu qui s'réveille l'plumes en pagailles et l'bec entrebâillé ! "
Et les deux mégères suivirent le mouvement en entamant par la suite un rire gras et des plus grotesque. Jbib, finit par détendre avec grande difficulté une nuque écourtée. Sa tête plongea sur son abdomen duveteux et plumeux. " Pas l'temps pour t'épier, raclure d'bidet, sal'volaille, va donc farfouiller l'zone, et ramène nous un d'tes courtauds d'compagnons pour not' souper. D'pêche toi dont, avant d'creuver au crépuscule !" beugla une des trois mégères, qui, d'un claquement de doigt sec conclu ses paroles.
Ce tintouin éphémère provoqué par les griffes de l'affreuse femme, engendra des mouvements incontrôlés chez Jbib. L'imposante chouette qu'il était devenu se mit à prendre de l’altitude maladroitement en s'éclipsant par une lucarne aux carreaux brisés. Il entendit brièvement les éclats des trois sorcières, avant que l'altitude ne vienne définitivement étouffer le son.
La conscience de l'homme à l'intérieur de son corps nouvellement bestial se morfondait. Jbib, benet malgré lui était tombé dans un piège, la chouette qu'il traquait, étant probablement le chasseur disparu. Et désormais mort. Lui même allait trépasser aux premières lueurs de l'astre lunaire. Sa destination toujours contrôlée par une des trois mégères, le désespoir l’affligea des tourments propres à ce maux. Il était devenu la proie. Et pour l'envaser dans une folie encore plus létale il arriva droit sur son objectif. Et pas n'importe lequel...
Drog. Et, tel le destin se jouant d'eux, le serpent se mordant la queue dans une inlassable répétition, Drog loucha vers son ancien compagnon, le tromblon en main, en entamant une course effrénée vers l’oiseau crépusculaire, objet de sa convoitise. Jbib pauvre bête esseulée toujours manipulée, fit demi-tour pour retourner vers l'épaisse jungle... et la masure.
Il tenta en vain de prévenir son ami, mais rien ne sortait de son gosier, hormis des hululements incessants.. " Hahaha Jbib n'a pas réussi à t'chopper saloperie, j'en fais mon affaire t'quiètes pô tiens ! " cracha Drog, poursuivant son propre compagnon de chasse, reflet de son propre trépas... dans l'ignorance la plus parfaite qu'un destin tragique l'attendait au détour….
<L'elfe se tourne vers l'assistance, et d'une voix satinée, conclue son récit>
Depuis ce jour, il est dit que les enfants qui naissent l'année de la Chouette, en journée, là ou l'animal est normalement endormi, se verront affligés d'une intelligence limitée et d'une personnalité des plus banales. Mais après tout, ce n'est qu'une légende...
FIN
Manarah Nindralyr
Histoire contée lors de l’événement "Contes & Légendes" (2019) du Relais.
Dernière édition par Manarah Nindralyr le Sam 21 Nov - 19:38, édité 3 fois
Re: Manarah Nindralyr l'Ahib exilée.
Dernière édition par Manarah Nindralyr le Dim 6 Mar - 18:09, édité 4 fois
Re: Manarah Nindralyr l'Ahib exilée.
Dernière édition par Manarah Nindralyr le Dim 6 Mar - 17:56, édité 2 fois
Re: Manarah Nindralyr l'Ahib exilée.
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C'est le comble de la folie que de se proposer la ruine des passions. Le beau projet que celui d'un dévot qui se tourmente comme un forcené pour ne rien désirer, ne rien aimer, ne rien sentir, et qui finirait par devenir un vrai monstre, s'il réussissait ! ------ Denis Diverot.
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C'est le comble de la folie que de se proposer la ruine des passions. Le beau projet que celui d'un dévot qui se tourmente comme un forcené pour ne rien désirer, ne rien aimer, ne rien sentir, et qui finirait par devenir un vrai monstre, s'il réussissait ! ------ Denis Diverot.
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La folie ne s'explique pas, elle se ressent.
"Elle peut vous consumer. Brûler en vous, en détruisant la chair carnée par sa souillure. Souillure intemporelle cramponnée dans votre esprit. Et plus l'esprit est déraisonnable, plus l'amarrage aliénant de la folie sera.
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Oh.. ? Vous prétendez être apte à vous en prémunir ?
On ne dompte pas l'impalpable.
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Oh.. ? Vous prétendez être apte à vous en prémunir ?
On ne dompte pas l'impalpable.
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Fermez vos battants. Fermez vos lucarnes. Vos soupirais. Bâillonnez votre cœur. Calfeutrez vos yeux et votre esprit. Condamnez toutes les issues que vous jugerez failles pour vous, et opportunités pour elle.
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Rien n'y fera.
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Rien n'y fera.
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On ne peut posséder ce qui possède. Se soustraire à l'inaltérable ascension de la déraison qu'elle provoque.
C'est impossible, infaisable, chimérique ! Et vous vous devez de l'accepter... L'apprivoiser...
Le facteur le plus frustrant voyez vous chez elle.. c'est.. son intrusion poussive. Haletante. Progressive. Elle se déguste de ce combat à sens unique. Car là ou le danger nous semble loin, quand il survient au pieds de notre conscience, n'espérez plus recevoir l'aide de celle-ci déjà souillée par l'opportunisme de la folie. Le mirage devient cauchemar.
Fracturez de vos poings un plan d'eau. Vous n'aurez comme résultat, qu'éclaboussures, ondulations, et houles passagères. Quoique vous fassiez, la nature du liquide retrouvera sa forme souche.
Voici une belle analogie. Considérez la folie comme telle. Frustrante et immuable à vos essais futiles pour la canaliser.
De plus elle est trompeuse et fourbe. Car elle conçoit parfaitement vous octroyer, de temps à autre, un semblant d'esprit. Les retrouvailles d'une lucidité oubliée. Et quelle meilleure torture pour elle, de revenir telle une fièvre galopante là ou vous pensiez être acquitté de ses maux.
Elle a sa propre volonté. Sa propre conscience. Ses murmures ne sont que paroles empoisonnées. Ses murmures ne sont que sagacité impie... Et dans le désespoir qu'elle sème, n'y espérez aucune issue.
La folie est une impasse. Et le jour ou vous forcerez le passage, vous n'y verrez qu'une nouvelle facette, plus dévorante et insaisissable de ses nombreux tourments. C'est une colère sourde qui s'élance dans les tours brûlées de notre âme exaspérée."
"Vous me paraissez contrariée d'établir les anomalies singulières de la folie... Vos propos me semble pourtant cohérents."
"Oh ?.... Vraiment ?!"
Mais voyez vous la folie n'est t'elle pas avant tout source de passion ? Le fanatisme qu'elle colporte en son sein ne descelle t'il pas une fougue frénétique s'assimilant à un quelconque mysticisme passionnel ?
Tout comme n'importe quelles cérémonies ecclésiastiques démentes, dictées par des théologiens ou ordres mendiants, pour qui, les adeptes, sous dictât de passion, concordent tous à y trouver un intérêt commun.
L'amour n'est t'il pas folie ? S'attacher à l'ombre d'une entité qu'on estime plus que soi même, en écoutant l'absurdité des choix dictés par notre cœur ?
La passion, l'adoration, la fougue, l'art, les émotions, la ferveur, la luxure sont pour bon nombre d'entre nous sources de satisfactions. Mais l'entreprise de chacune de ces facettes, ne révèle t'il pas en leurs seins une folie souche ?
Pouvons donc affirmer que la folie est néfaste ?
Si on en faisait l'analogie d'une lumière, n'illuminerait t'elle pas notre cœur là ou tant semble présager qu'elle l'assombri ?
Mais la lumière, loin de créer cette folie n'en serait que son apparat, l'ancrant en nous, en la figeant un moment dans notre espace ou elle demeure captive à jamais.
Sommes nous donc captif d'elle, qu'elle nous paraisse bonne ou mauvaise peu importe notre degrés de dénégation ? Si tel est le cas, l'apprivoiser n'est t'il pas envisageable pour s'en prémunir ? Pour éclairer notre âme là ou nulle autre lueur n'est, et ne sera jamais apte à s'immiscer aussi bien qu'une perle scintillante illustrant la folie ?
"Vous gratifiez son aliénation sous dictas de questions rhétoriques dont vous semblez déjà connaître la réponse..."
"Oh... Vraiment ? Mais la folie n'est t'elle pas la facette cachée de la raison ?"
"En ce cas, quelle est la facette raisonnable et déraisonnable dans votre discours ? Celle ou vous l'honorez d'un ton suave, ou celle ou vous l'affligez d'un timbre de voix belliqueux ?"
"N'est t'il pas habituel d'honorer en gratifiant et d'affliger en dépréciant ?"
"La folie n'a guère de raison. C'est là tout le sens du terme. Gratifier le côté juste d'une réalité est naturel. Vous semblez voir en "elle" cet aspect bienveillant... Et l’intonation de vos paroles tendent à croire que vous penchez plus du côté dérais.."
"Ce danger évident qu'elle peut procurer, par un quelconque effet pervers, loin de m’écarter, me pousse à en vouloir toujours plus.
Comment une si petite pierre peut amener en son sein, le désir indéfectible d'endurer tout çà....
..... Je ne m'en lasse pas..."
".... Déraisonnable de la chose.."
Keplan 281 Conversation entre Manarah et un alchimiste local.
Dernière édition par Manarah Nindralyr le Dim 15 Nov - 18:43, édité 7 fois
Re: Manarah Nindralyr l'Ahib exilée.
Tornyr
Tu réponds au nom de Tornyr,
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Tu es de celle qu'on admire. Stature impériale, rien n'ébranle ta prédation. Certains te vénère pour ta sagesse, mais crois moi, il n'y verrait là qu'une infime poussière dans un océan d'habilités qui leurs sont inconnus à ton égard. Représentation absolue de l'excellence, rien ne cède sous l'amorce de tes serres. Rien n'ébranle ta danse dans l'éther de la nuit.
Omnisciente, tu es de celle qui voit tout, mais qui ne concède rien à ceux voulant t'aborder. Une présence méphitique dans les ténèbres. Tu n'appartiens pas au temps car tout se fige en ta simple présence. Un branlement de ta part, une oscillation de ton regard ambré, et il est déjà trop tard. Le silence est rompu dans un soupir imperceptible, le temps retrouve son cycle, mais tu as déjà semé sur ton sillage la mort, avec comme seul témoin de ton méfait la lune surplombant la voute céleste.
Tu n'as comme allié que ta solitude. Mais le chasseur solitaire est le seul à connaitre le prix que lui a coûté son gibier. Porteuse d'un masque de plumes, tu ne révèles ton authenticité à personne. Car on ne te dois rien. Tu es majestueuse, et surplombe de tes ailes frémissantes tout ceux n'arrivant pas à ta stature immaculée. Soit en fière, et ne t'abaisse jamais à regarder plus bas que tes rectrices car tu n'y verras que convoitise et jalousie en contrebas.
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Il a de ceux qui perçoivent chez toi, le symbole même de mauvaise augure, mais crois moi, il n'y verrait là qu'une vérité justifiée par des accusations infondées. Associée aux esprits malins, seul les idiots t’abhorrent. Et le pire chez les ignares sont ceux qui affirment avoir raison. Certains accordent à s'entendre sur ta similitude avec les corneilles. Je n'y vois là qu'une naïveté probante. Et tout comme l'idiot, l'ignorance croit tout. Les corbeaux tournoient, jacassent et s'agitent en tout sens à la vue d'une carcasse. Leurs croassements n'est qu'un hymne à l'impatience.
Mais toi, tu es immobile. Réfléchir sans agir et non l'inverse. Voilà une différence t'opposant à eux. Ne profitant pas de ce qu'on t'offre, tu décides toi même des convoitises qui justifient tes déplacements. Seule la mort est le point d'amorce te rattachant à ces plumes d'ébènes. Mais celles que tu orchestres sont raffinées. Car la véritable élégance consiste à ne pas se faire remarquer.
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Comme tes yeux, certaines pensées ne supportent pas la lumière du jour. Elles ne peuvent naître que la nuit. Je suis donc, tout comme toi, éveillée là ou monde s'affaisse dans un sommeil profond. Je suis de celle qui rêve sous un manteau d'étoiles estimant qu'elles m'apportent plus de réponses que l'astre ardent qui les évincent. Je m'accorde tes faveurs en m'inspirant de ton silence. J'estime qu'il est, à lui seul, une réponse suffisante nous liant tout deux. Car à l'inverse des corbeaux, bruyants et sauvages, je ne croasse pas pour te faire fuir. Je me tais pour te charmer.
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Tu sais Tornyr, mon simple sang permettrait de justifier ta dépendance à mon égard. Car aussi insolente soit-tu, n'oublie jamais une chose. Je suis née de la lune, et même si je me suis détournée de celle-ci, elle est bien là, l'unique chose que tu n'atteindras jamais et celle que tu convoiteras éternellement. Ma jade est la seule spectatrice de tes imperfections, et estimant en avoir peu, il est aisé de citer celles qui démontrent l'ascendance que j'ai sur toi.
Tu aurais pu croiser le soleil. Déposer ton ombre sur les terres Kamasylviennes en jouant de l'affection que les Ganelles te portent. Ancrer tes griffes sur l'arbre millénaire en profitant des faveurs qu'il t'accorde. Aussi détestables soient-elles, je peux au moins constater chez ces dernières, le respect qu'elles entretiennent avec les âmes de la sylve. Mais crois moi, aussi profonde soit ta conviction, tes rétines auraient brûlé dans ce monde qui n'est pas tient. Je t'ai finalement imposé ce qui te correspondait le mieux.
Je suis capricieuse Tornyr. Et là ou la voie t'étais ouverte pour aller à leurs rencontres, je l'ai colmaté d'orties, de sang et de mes propres serres pour t'asservir. Aujourd'hui, tu ne voles que sous ma juridiction, tu ne chuintes qu'en mon absence. Oh... tu peux pleurer à la lune en lui contant tout les maux qui t'accablent. Ils sont nombreux, je le sais, et tu as toutes les raisons du monde pour geindre. Mais cette dernière ne renverra chez toi qu'une pâle lueur froide te rappelant que tu seras toujours seule, meurtrie par ton chagrin. Au moins, tu évites la douleur lancinante du feu.
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Alors ne soit pas vindicative. L'asservissement ne dégrade pas seulement l'être qui en victime, mais celui qui en bénéficie. J'endure pour toi, autant que tu subis. Je ne t'inflige ainsi jamais ce que moi même suis incapable d'essuyer. M'élevant en despote, tu n'as rien à redire. Mes choix sont absolus, réfléchis, et aussi souveraine soit-tu quand tu déploies tes ailes, je sais te rappeler que la cage les atrophiant n'est jamais bien loin.
Je sais Tornyr, il m'arrive de te tancer injustement. Je m'insurge pour bien peu. Je m'assoupi pour bien pire. Une danse absurde ou à chaque pas, je suis sur le mauvais pied. Mais je ne regrette rien.
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Tu découvres cette nuit les vastes étendues désertiques qu'offre Valencia. Les forêts sont pauvres et affligées par l'aridité du disque ardent. Les Hommes ont tendances à préférer la richesse de leurs cités que celles de la nature, c'est un fait. Ainsi, moi au sol, je ferais germer des graines pour défigurer ce paysage morne. Narc répondra à mon appel pour déverser les flots nécessaires à la floraison de mes pousses. Ceux qui entraveront ma route seront lacérés par mes ronces. Il ne fait aucun doute que ma science sera glorifiée ici, consolidée par ma situation en Serendia. Mon sang peut être moins, cela m'indiffère. Il bouillonnera face aux affres de mes pérégrinations, comme il l'a toujours fait.
Quant à toi Tornyr, je te laisse les cieux. Approprie toi ce qui t'appartiens de droit. Taillade les ailes qui voleront plus hautes que les tiennes. Sème la mort dans un typhon de plumes. Soit un spectre muet que tous craindra. Et quand l'aube se lèvera, rouge de tes desseins, rejoint moi.
Nous ferons de cette cité une nuit éternelle, ou nous serons tout deux rois.
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Tu réponds au nom de Tornyr, "l'éclipse qui fait sombrer les astres" et aussi inaccessible suis-je pour toi, tu finis toujours par épouser mes formes en montrant au reste du monde qu'il est bien bas.
Dernière édition par Manarah Nindralyr le Lun 12 Juil - 5:45, édité 1 fois
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